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HOSHIN
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31 août 2005

Chapitre premier : Le songe d'une nuit d'été

C'était une nuit agitée, où les rêves s’accumulaient. Un véritable univers s'y dessinait, une histoire, une destinée ... une vie ... et puis soudain, une image, le spectre, immatériel, une voix, assourdissante, une parole ... un message ...

"Tu te feras désormais appeler le Vénérable Yuanshi !
Et tu bâtiras le domaine céleste !"

C'est alors que se dessina un plafond, un toit de chaume .Le jeune Yuan venait d'ouvrir les yeux, et se réveilla en sursaut. Il venait de faire un terrible cauchemar , c'était la première fois qu'une de ses visions était aussi forte , la première fois qu'un de ses rêves était aussi intense et réel . Mais comme la plupart des rêves que nous pouvons faire, il ne se souvenait pas de tous les détails, de toute l'histoire ....

Yuan sortit de son lit, et aussitôt de sa hutte. Encore en sueur après cette nuit, il prit l'air et alla se rafraîchir le visage dans la rivière. C'était l’été, en cette période de l'année les nuits étaient particulièrement chaudes, le sommeil était pénible. Mais cette nuit là avait été plus tourmentée que n'importe quelle autre pour le jeune paysan.

Alors qu'il trempait ses longs cheveux d'or dans l'eau fraîche, il essayait de chasser les idées de ses esprits. Il resta un moment ainsi, quand soudain, il sentit que quelque chose lui touchait le dos. Il sortit la tête de l'eau, bondit et fit volte face.

« Eh bien, Yuan, qu'y a-t-il ? On dirait que tu as vu un fantôme ! »

Devant lui, se tenait Guifei, une jeune paysanne. Yuan tourna une nouvelle fois la tête en direction du ruisseau. Il avait effrayé Guifei par sa réaction impulsive, et en était honteux.
Guifei, voyant que son ami n'était pas d'humeur à discuter de ses tourments, se leva et alla partir sans un mot.

« Cette nuit, j'ai fait un rêve.»

Sans se retourner, Yuan avait compris qu'il allait peiner la seule amie qu'il avait dans ce monde. Guifei s'arrêta et se rassit à coté de Yuan.

« Et qu'y avait-il dans ce rêve ?
_ Je .... Je ne sais pas. Il y avait tellement de choses qui se succédaient, que je n'ai pu en retenir une seule. Mais tout cela semblait être lié. Et puis ...
_Et puis ?
_Rien, je me suis éveillé.»

Guifei émit un petit rire discret, mais Yuan le remarqua :
« C'est ça ! Moque-toi de moi !
_Désolé, c'était plus fort que moi. Mais avoue que, à ton âge, faire encore des cauchemars ... »

Yuan, vexé, se leva et partit. Il devait aller travailler la terre, les plantes n'allaient pas pousser toutes seules. L'épuisement du travail calma son esprit, et il pensait même aller s'excuser pour son comportement bougon de la matinée.
En effet, Yuan ne voulait pas perdre Guifei. Elle seule lui parlait, car tous les autres habitants du village essayaient de l’éviter, où se contenter de lui donner des ordres. A elle seule, il pouvait ouvrir son coeur. Ils avaient tous les deux dix-sept années, ils se comprenaient, et Guifei avait su apprécier Yuan pour ce qu'il avait au fond de son coeur, cette solitude et cette mélancolie, créés par l’isolement.

Sous l'accablant soleil du huitième mois, Yuan était en nage. Il s'arrêta un moment, et releva la frange tombant sur son visage pour essuyer sa sueur. Le soleil se reflétait dans la perle couleur émeraude qui ornait son front.

Cette perle, cette anomalie frontale, c’était la cause de son exclusion. Yuan n’était pas comme tous les autres, et dans cette époque d’obscurantisme, il était perçu comme un être malfaisant, un monstre. Mais Yuan était persuadé du contraire, et Guifei était la seule à rejoindre son idée.
En effet, à part cette perle, il avait en apparence tout d’un être humain, et il avait bien été enfanté par une mère.

Le soir venu, Yuan prenait son repas, encore l’esprit embrumé par mille questions. C’est alors que Guifei le rejoint.
« Tu y penses encore, n’est-ce pas ?
_...
_Ecoute… Si tu veux ce soir, on pourrait y retourner. »
Yuan savait très bien à quoi elle faisait allusion.

Au beau milieu de la nuit, Yuan et Guifei sortirent du village, pour aller dans cet endroit secret . Ils traversèrent un champ en douce, c’est alors que Yuan percuta quelqu’un ! Il se releva et aperçut un gamin, d’une quatorzaine d’années, assez corpulent.
Guifei s’écria :
« Li-Huang !
_Mais…Guifei ? Qu’est-ce que tu fais là, avec ce monstre ? Vous voulez sortir du village ?
_ Et toi, que fais-tu ici à une heure pareille ? A cette heure-ci, les gamins doivent dormir !
_Grrr… Vous allez voir ! Je vais le dire à mon père, c’est une faute grave de quitter le village sans permission !
_Oh … et qu’en pensera-t-il, quand on aura dit que le fils du chef vole des légumes en pleine nuit ?
_Erf… maudite femelle…
_Bon, eh bien puisqu’on t’a croisé, nous n’avons pas le choix, tu viens avec nous !
_Quoi ?
_Oui, je ne vais pas te laisser rentrer au village, je n’ai pas du tout confiance en toi, crapaud ! »

Guifei était une fille d’un tempérament particulièrement vivant et persuasif, à l’opposé des autres filles, plus discrètes et passives. C’est ce qui faisait sa force et son charme. Ainsi, Li-Huang les accompagna de force jusqu’au lieu voulu.

Devant eux se dressait un temple très ancien. Il était usé par le temps, mais semblait avoir subi un cataclysme…

Sûrement le grand cataclysme, dont on trouvait des traces un peu partout, et qui semblait avoir détruit toute la civilisation ancienne. Les gens attribuaient ce cataclysme à une colère de monstres ou de dieux…. Et cette crainte surnaturelle était aussi une des causes de l’exclusion de Yuan.

Yuan et Guifei étaient déjà allés devant le temple, mais Yuan n’avait jamais osé y rentrer. Sans doute avait-il peur de comprendre sa véritable nature. Mais ce soir là, après ce rêve aussi étrange, il était plus que motivé. Ainsi, ils allumèrent des torches et rentrèrent à l’intérieur.
Li-Huang ne cessait de râler : « C’est dangereux ! Ça peut s’écrouler à tout moment ! Il faudrait être bête pour rentrer là dedans ! » Mais ses complaintes étaient calmés par les coups de poing de Guifei sur le haut de son petit crâne.

Enfin, après un long couloir, les trois jeunes arrivèrent dans une pièce centrale, ornée d’une grande fresque. Cette œuvre était révélatrice du développement de cette civilisation perdue, bien plus avancé que la civilisation actuelle. Il y avait même un début de formes ressemblant à un alphabet, donc à de l’écriture. Mais cela, c’était encore incompréhensible pour nos trois jeunes gens.

Yuan regarda la fresque attentivement. Il y vit des hommes, un peuple, un roi … mais aussi des créatures, avec des têtes d’animaux, des ailes ou des queues, des crocs…. semblables aux monstres imaginés par les croyances actuelles. Yuan était perdu : était-il un descendant de ces êtres ? Il était tourmenté, quand il vit une autre partie de la fresque. Il y vit des hommes, entourés d’auras de lumière, pouvant déchaîner les éléments, et qui affrontaient les monstres précédents… C’étaient là comme des surhommes, semblables à des dieux bénéfiques. Yuan comprit alors, cela lui apparut comme une évidence :

« Je... Je ne suis pas un monstre !!! Je suis… un Dieu !! »

Mais au moment où il prononçait ses paroles, il fut frappé d’un violent mal de tête. Comme un coup de gourdin. Alors, il ressentit le même défilé d’images que dans son rêve la nuit dernière.

Alors qu’il se tordait de douleur, Guifei s’approcha de lui : « Yuan !!! Yuan est-ce que ça va ? »
C’est alors que la perle frontale de Yuan se mit à briller, et un souffle tourna autour de lui.
Guifei eut le réflexe de reculer. Un rayon de lumière partit de cette perle, et perça le plafond.
Guifei restait ébahi, mais le jeune Li-Huang était terrorisé, ayant cru voir le pouvoir d’un monstre.
Il partit en courant, sans savoir dans quelle direction il allait.
C’est alors que les murs tremblèrent. Le temple, qui était déjà fragile, venait de subir un assaut de trop.
Dans le fracas, Yuan se réveilla, Guifei était à ses cotés.
« Yuan ! Réveille-toi ! Il faut partir ! Le temple…
_Où … où est le gamin ?
_Il est parti en courant quand …. Enfin, il a du se perdre ! On n’a pas le temps !
_C’est moi qui l’ai effrayé, je le sais. Je dois le sauver.
_Arrête ! C’est de la folie !
_Guifei, sors du temple, je te rejoins très vite, je te le promets. »

Aussitôt, Yuan partit dans la direction où était parti le gamin. Guifei quant à elle n’eut pu retenir Yuan, et pensa à sa propre vie. Elle repartit en chemin inverse, et parvint à trouver la sortie.
Alors, elle se jeta à l’extérieur, se retourna, et vit le temple s’effondrer !
« Oh non !!! Yuan !!! Li-Huang !!! C’est affreux !!! »
Une épaisse fumée s’était propagée lors de l’effondrement de l’édifice. Guifei était restée là, couverte de poussière, à pleurer la disparition de son meilleur ami…
C’est alors que deux pierres se mirent à bouger. Guifei releva la tête. Les deux pierres bougèrent encore, puis tombèrent en roulant. Un nuage de fumée s’éleva encore, et au milieu se tenait Yuan , portant Li-Huang, encore inconscient.

« Oh ! Par le grand Pangu ! Yuan ! Tu es en vie !
_Je t’ai promis que je le sauverais … »
Mais la scène d’émotion ne dura pas. Les villageois, alertés par le vacarme de la chute du temple ancien, avaient accourus. Ils virent au milieu du désastre Yuan, tenant le jeune Li-Huang. Le chef du village se rua sur lui :
« Rends-moi mon fils, monstre ! »
Yuan rendit Li-Huang à son père, puis les autres villageois se ruèrent sur lui et le ligotèrent. Puis lui et Guifei furent ramenés au camp, afin qu’ils soient jugés selon les lois du village.

« Yuan, depuis longtemps nous te tenons à l’œil. Tu es une aberration de la nature, même ta propre mère n’a pu supporter le fait de t’avoir enfanté ! Aujourd’hui, tu violes les lois du village, entraînant avec toi mon fils, et tu sèmes le chaos ! Tu seras banni du village, c’est la loi ! »
Guifei intervint : « Yuan n’a rien à se reprocher ! C’est moi qui l’ai entraîné au temple ! Et puis,il a sauvé votre fils de la mort ! »
Mais Yuan l’arrêta : « Guifei, arrête, ne porte pas la responsabilité. Par ma faute, Li-Huang a été blessé, et ce temple écroulé. J’accepte mon sort. »
Guifei essaya encore de le persuader, mais Yuan était résigné.
Le lendemain matin, Yuan partait du village, acceptant sa destinée. Guifei aurait voulu l’accompagner, mais sa punition était justement de rester au village. Le visage couvert de larmes, elle parla avec Yuan une dernière fois, alors qu’il venait lui présenter ses adieux :
« Ne t’inquiète pas » dit Yuan, « cette épreuve devait m’être infligé, je le sais. Un jour, je reviendrais au village, je te le promets. »

Et voilà Yuan s’éloignant du village, parti pour accomplir sa destinée …

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